Comprendre la transition énergétique par la modélisation systémique
Le 24 novembre 2025, Think Innov’, en collaboration avec Umantex, a eu l’honneur d’accueillir Yves Caseau, Chief Digital and Information Officer du groupe Michelin et membre de l’Académie des technologies, pour un dîner-conférence exceptionnel consacré à un enjeu majeur de notre époque :
Comment mieux comprendre la transition énergétique dans toute sa complexité pour éclairer les décisions des leaders et des organisations ?
Dans un monde traversé par des crises multiples climatiques, énergétiques, économiques, géopolitiques, cette soirée a offert un espace rare : celui d’une réflexion rigoureuse, lucide et systémique, loin des postures idéologiques et des raccourcis médiatiques.
Quand le climat devient un problème de système
Le changement climatique est souvent abordé comme un sujet isolé, alors qu’il est en réalité l’expression d’un système global interconnecté : énergie, économie, démographie, géopolitique, technologie, ressources naturelles…
C’est précisément ce que met en lumière Yves Caseau à travers le modèle CCEM (Coupling Coarse Earth Models), fondé sur la dynamique des systèmes.
Un modèle qui ne vise pas à prédire l’avenir, mais à rendre visibles les enchaînements, les dépendances et les tensions entre les grandes variables de notre monde.
Une approche qui a profondément marqué les dirigeants présents, en permettant de sortir d’une vision fragmentée pour embrasser une lecture globale, systémique et structurée de la transition énergétique.
Trois grands axes pour penser la transition autrement
Au cours de son intervention, Yves Caseau a articulé ses travaux autour de trois grandes thématiques, au cœur des défis actuels.
1. Les dommages liés au réchauffement climatique
Il ne s’agit plus de débattre de la réalité du changement climatique, mais de comprendre l’ampleur et la temporalité de ses impacts.
Yves Caseau met en évidence un point central : les dommages climatiques sont encore largement sous-évalués, notamment en raison des incertitudes, des biais cognitifs et de la difficulté à modéliser les phénomènes de rupture.
Le modèle CCEM permet d’explorer différents scénarios, non pour trancher, mais pour objectiver les conséquences de nos choix collectifs.
2. La transition énergétique : une équation complexe
Contrairement aux discours binaires, Yves défend une vision pragmatique et systémique de la transition énergétique.
Il ne s’agit pas d’opposer les solutions, mais de penser une stratégie “all of the above” :
renouvelables, nucléaire, sobriété, efficacité énergétique, innovation industrielle.
Le véritable enjeu réside dans la vitesse de déploiement, les coûts, les contraintes physiques et les arbitrages politiques.
La transition n’est pas une utopie technologique, mais une transformation profonde des systèmes économiques et industriels.
3. La redirection écologique dans un monde fragmenté
Le modèle CCEM met aussi en lumière une réalité géopolitique complexe : tous les pays ne jouent pas avec les mêmes contraintes, les mêmes intérêts, ni les mêmes responsabilités historiques.
L’Europe, dépendante énergétiquement, n’a pas les mêmes choix que les États-Unis ou la Chine.
La question de la coopération mondiale devient alors centrale : peut-on construire une transition collective dans un monde marqué par la compétition stratégique et économique ?
Une interrogation structurante pour les dirigeants présents, confrontés à ces tensions dans leurs propres décisions.
Penser sans polariser : une démarche de décomplexification
Ce qui a frappé les participants, au-delà du contenu, c’est la posture d’Yves Caseau :
une approche rigoureuse, sans dogmatisme, qui invite à dépasser la polarisation.
Ni catastrophisme paralysant.
Ni techno-optimisme naïf.
Mais une méthode : partir de la complexité, expliciter les hypothèses, tester les scénarios, confronter les points de vue.
Le modèle CCEM introduit notamment un concept fort : le “facteur de douleur”, qui intègre les coûts sociaux, économiques et humains des crises climatiques.
Il rappelle que les transitions se déclenchent rarement par conviction seule, mais souvent sous l’effet de chocs et de tensions.
Une soirée Think Innov’ : comprendre pour mieux agir
Ce dîner-conférence a rassemblé dirigeants, décideurs, responsables innovation, RSE et transformation autour d’une ambition commune : sortir du débat stérile pour entrer dans une compréhension structurée et actionnable des enjeux.
Fidèle à sa mission, Think Innov’ a conçu cette soirée comme un espace de réflexion collective, où la connaissance nourrit la décision, et où le dialogue permet d’ouvrir de nouvelles trajectoires.
Car au fond, comme l’a rappelé Yves Caseau, le vrai sujet n’est pas de choisir entre optimisme ou pessimisme, mais de décider quelles actions nous choisissons de mettre en œuvre, individuellement et collectivement.
La transition comme œuvre collective
Ce dîner avec Yves Caseau s’inscrit dans la continuité des événements Think Innov’, dédiés aux grandes mutations contemporaines.
Il rappelle une évidence : la transition énergétique n’est pas qu’un enjeu technique ou écologique. Elle est aussi un enjeu de gouvernance, de leadership et d’intelligence collective.
Et c’est précisément dans ces espaces de rencontre, de confrontation d’idées et de réflexion partagée que se cultivent les transformations durables.